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Ne pas se tromper de débat européen. Il n’a pratiquement pas été question, jusqu’à présent, du projet de Constitution, sujet important de ces élections du 13 juin.

Par Hubert Haenel, sénateur du Haut-Rhin, président de la délégation pour l’Union européenne, membre de la Convention européenne
La Croix, mercredi 12 mai 2004

Nous allons élire le Parlement européen dans moins de cinq semaines. En France, de quoi est il question dans le débat électoral ? De la Turquie, principalement, et de l’« Europe sociale », accessoirement.

Or, le problème de l’adhésion de la Turquie ne se posera pas au Parlement européen que nous allons élire, ni même vraisemblablement à celui qui lui succédera dans cinq ans. À supposer même que des négociations s’ouvrent l’année prochaine avec la Turquie, tout laisse à penser que c’est vers 2015 qu’une décision devra être prise. Et cette éventuelle adhésion devra recueillir l’assentiment non seulement du Parlement européen, mais de chaque pays membre, soit par la voie parlementaire, soit par référendum. Il est donc paradoxal de voir notre débat électoral se focaliser sur un sujet où la décision est à échéance de dix ans, et dont l’échelon national garde totalement la maîtrise.

L’« Europe sociale » est elle un sujet plus immédiat ? Le président de la République a eu raison de souligner qu’il n’y a pas de vrai clivage en France sur ce thème. Notre pays a des standards sociaux très élevés : son intérêt, à l’évidence, est d’éviter que les pays membres ne se concurrencent sur ce terrain. De plus, un degré élevé de solidarité sociale nous paraît être un des éléments du modèle européen, et même de l’identité européenne. Cela dit, nous devons considérer aussi que les écarts de développement au sein de l’Europe des Vingt-Cinq sont considérables. De ce fait, il est exclu que les mêmes règles sociales s’appliquent rapidement d’un bout à l’autre de l’Europe : ce serait empêcher les nouveaux États membres de rattraper sur le plan économique leurs partenaires de l’Ouest. Le contre-exemple de l’Allemagne de l’Est est là pour montrer les inconvénients - alors même que des transferts financiers gigantesques ont été consentis - d’une harmonisation trop rapide entre des zones où la productivité diffère profondément. La convergence sociale est éminemment souhaitable, mais ne pourra être que progressive. Sa réalisation complète est manifestement de l’ordre du long terme, d’autant que les matières en cause sont et resteront pour l’essentiel de compétence nationale.

Ainsi, contre toute logique, le débat électoral européen se concentre sur des questions qui concernent l’horizon lointain et ne sont pas au coeur des compétences de l’Union.

En revanche, il n’a pratiquement pas été question, jusqu’à présent, des grandes questions qui appartiennent pleinement à l’actualité européenne.

Le projet de Constitution, tout d’abord. Son adoption sera en tête de l’agenda européen dans les deux prochaines années. Or, cette question centrale est si peu évoquée que la plupart des électeurs ignorent à peu près tout du contenu de ce projet. Pourtant, dans toute l’Europe, les élections du 13 juin sont considérées comme un test important pour le processus constitutionnel.

Ce qui est tout aussi paradoxal, c’est que les grands sujets qui sont vraiment de compétence européenne sont à peine évoqués. Les relations commerciales internationales (l’OMC), la politique monétaire, l’agriculture, les biotechnologies, l’aménagement du territoire, l’immigration sont en grande partie - voire exclusivement pour certaines d’entre elles - des compétences européennes et non plus nationales. La logique voudrait que le débat des élections européennes porte en priorité sur les politiques de l’Union dans ces domaines, d’autant que les enjeux financiers, économiques, sociaux sont très lourds.

Sur d’autres questions essentielles, les compétences nationales et européennes sont imbriquées : quelle politique étrangère, quel système de défense pour l’Europe ? Pourquoi la zone euro est elle la zone du monde où la croissance est la plus faible ? Comment stimuler la recherche et l’innovation ?

L’absence de débat sur ces questions est d’autant plus préoccupante pour notre démocratie que le nouveau Parlement européen aura son mot à dire sur ces sujets.

Bien des Français ont gardé l’idée que le Parlement européen est un forum sans grand pouvoir. Ce n’est plus vrai : depuis les traités de Maastricht et d’Amsterdam, l’Assemblée de Strasbourg dispose de larges pouvoirs législatifs et budgétaires, et tend à devenir l’institution centrale de l’Union.

Dans ces conditions, serait-ce trop demander que les élections européennes servent enfin à se prononcer sur le devenir de l’Europe ?

Nous sortons d’élections régionales où il a été à peine question des sujets entrant dans les compétences des régions. Nous allons maintenant élire le Parlement européen, et il est à peine question des sujets pour lesquels l’Europe est prioritairement compétente. Comment le citoyen s’y retrouverait il ? Ne nous étonnons pas de le voir ensuite de désintéresser des élections ou se réfugier dans des votes extrêmes. La démocratie vit de responsabilité. Mais comment approuver ou sanctionner les responsables, si à chaque fois nous nous trompons d’élection ?

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