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Tous les pays membres de l’Union européenne vivent, par des voies diverses, un équilibre entre, d’une part, le respect de la liberté de conscience et de religion, et d’autre part, le fait que les pouvoirs publics ne peuvent pas faire comme si le religieux n’existait pas.

Ne sacralisons pas la loi de 1905

Par Hubert Haenel, sénateur du Haut-Rhin, Membre de la Convention européenne
La Croix, mercredi 8 décembre 2004

Jacques Barrot a eu raison de lancer, dans La Croix du 24 novembre, un appel au débat et à la réflexion sur la laïcité dans notre pays. Bien sûr, le centenaire de la loi de 1905 ne manquera pas, dans les mois qui viennent, d’alimenter les discours ronflants et apparemment consensuels, se concluant par des appels à la vigilance toujours nécessaire. Mieux vaudrait admettre que les choses sont moins simples.

Certes, la loi de 1905, adoptée dans un contexte de « laïcité de combat », était loin d’être la version la plus dure des textes envisagés à l’époque. Mais il a fallu des modifications importantes, de droit ou de fait, pour parvenir à la laïcité apaisée que nous connaissons aujourd’hui : accord sur la formule des associations diocésaines, rétablissement des relations diplomatiques avec le Saint Siège, loi Debré sur les établissements sous contrat, assimilation fiscale des associations diocésaines aux associations d’utilité publique, maintien du régime particulier de l’Alsace Lorraine. Ne sacralisons donc pas la loi de 1905 ! Elle est un des éléments d’un équilibre. C’est cet équilibre qu’il faut préserver, et pour cela il n’existe pas une formule unique. Tous les pays membres de l’Union européenne vivent, par des voies diverses, un équilibre entre, d’une part, le respect de la liberté de conscience et de religion, et d’autre part, le fait que les pouvoirs publics ne peuvent pas faire comme si le religieux n’existait pas, en le reléguant dans une mythique sphère « purement privée ». Nous mêmes, en France, pratiquons deux formules différentes : et qui peut sérieusement dire qu’en Alsace-Lorraine la liberté de conscience et de religion est moins bien garantie que dans le reste de la France ? Elle l’est au moins aussi bien, mais par d’autres voies.

Ensuite, il faut le reconnaître, la laïcité « à la française » a pris, dans les faits, en grande partie, la forme d’un modus vivendi avec l’Église catholique. Certes, le Concordat s’appliquait aussi - comme il s’applique encore en Alsace Lorraine - au protestantisme et au judaïsme, mais la prépondérance numérique des catholiques par rapport aux autres religions était écrasante. C’est, en pratique, dans les rapports avec l’Église que s’est dégagé, au fil du temps, l’équilibre actuel. Or, nous sommes entrés dans une situation complètement nouvelle avec l’apparition, en France, d’une communauté musulmane de quatre à cinq millions de personnes. La loi de 1905 n’est pas adaptée à cette situation, ce qui conduit par exemple à ce que les édifices affectés aux cultes catholique, protestant ou israélite soient entretenus, dans leur très grande majorité, par les pouvoirs publics, alors que ce n’est pas le cas pour les lieux de culte musulmans. Ainsi, nous demandons à nos compatriotes musulmans de s’intégrer dans la société française, mais, en même temps, nous faisons en sorte que, pour l’organisation pratique de leur culte, ils soient en réalité dépendants d’autres pays. Nier ce problème au nom d’une laïcité « pure et dure » qui n’a pas cours pour les autres religions, est ce vraiment l’attitude la plus appropriée ?

Mais il y a, me semble t il, une autre raison pour laquelle le débat doit être ouvert, même s’il est difficile. La société française est en perte de repères. Le chômage y demeure endémique. Dans un tel contexte, il est toujours tentant de chercher à faire l’unité de la communauté contre une petite partie de ses membres. Mais la meilleure prévention contre ce risque, n’est ce pas le dialogue et la connaissance réciproque ? Or, s’il y a tout de même un échec de la laïcité « à la française », c’est d’avoir produit une situation où la plupart des Français ignorent presque tout du fait religieux et se trouvent ainsi coupés d’une dimension essentielle de leur culture et de leur histoire. Comment pourraient ils saisir les enjeux d’une adaptation de notre laïcité à une situation nouvelle, et comprendre les aspirations de nos compatriotes musulmans ? En réalité, à force de dire : « Cachez ce religieux que je ne saurais voir », on ouvre la voie à bien des dérives. Autant une laïcité ouverte me paraît être une protection essentielle contre le mécanisme du « bouc émissaire », autant une laïcité de dénégation me paraît ouvrir le risque de voir une ou plusieurs communautés religieuses, ou même toutes les communautés religieuses simultanément, devenir des cibles.

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